Faut-il toujours “se dépasser” ? Le culte de la performance en question


“Se dépasser”. Voilà une injonction que l’on retrouve partout : dans les slogans publicitaires, les salles de sport, les discours d’entreprise. Comme si la vie n’avait de valeur que dans la course permanente à faire “plus”, “mieux”, “plus vite”. Mais faut-il toujours chercher à se dépasser ? Et si la vraie victoire consistait parfois… à ralentir ?

La performance comme mantra contemporain

La performance est devenue la valeur cardinale de nos sociétés modernes. Dans le sport, on glorifie l’exploit, le dépassement des limites. Dans l’entreprise, on encense la productivité et l’efficacité. Même dans le domaine du bien-être, la tendance s’installe : méditer plus longtemps, tenir plus de postures, accumuler des “objectifs” spirituels.
Or, cette logique, héritée de la révolution industrielle et amplifiée par le capitalisme numérique, peut avoir un coût invisible : l’épuisement.

Le risque du toujours “plus”

Les neurosciences montrent que notre cerveau est câblé pour rechercher la récompense et l’amélioration (dopamine oblige). Mais lorsque cette quête devient permanente, elle épuise le système nerveux. On finit par basculer dans le burn-out, le brown-out (perte de sens) ou le bore-out (ennui). L’excès de performance nous coupe paradoxalement de ce que nous cherchons à atteindre : la joie, le sens, l’élan vital.

Quand le yoga propose un autre rapport à l’effort

Le yoga ne nie pas l’effort : certaines pratiques comme l’Ashtanga ou le Vinyasa demandent rigueur et discipline. Mais dans sa philosophie, le yoga rappelle une chose essentielle : l’effort juste (tapas). Cela signifie aller au-devant des résistances… sans tomber dans l’acharnement.

  • Ahimsa (non-violence) : ne pas se maltraiter au nom de la performance.

  • Satya (vérité) : reconnaître où l’on en est, sans masque ni compétition.

  • Santosha (contentement) : cultiver la joie de l’instant, sans attendre la “version 2.0” de soi-même.

Le paradoxe du dépassement

Il existe une nuance : se dépasser peut être libérateur, à condition que cela vienne d’un élan intérieur, et non d’une injonction extérieure. Gravir une montagne, tenir une posture difficile, se lancer dans un nouveau projet : autant d’expériences qui peuvent nourrir l’estime de soi.
Mais la clé est là : la performance n’a de sens que si elle nous rapproche de nous-mêmes, pas si elle nous éloigne de notre bien-être.

Des pistes pour réconcilier effort et équilibre

  • Remplacer les objectifs par des intentions : plutôt que “courir 10 km”, viser “bouger avec plaisir”.

  • Accueillir les pauses comme partie du processus : le repos n’est pas un échec, c’est une étape.

  • Privilégier la régularité à l’intensité : mieux vaut 20 minutes de yoga quotidiennes que 2 heures intensives une fois par mois.

  • Écouter les signaux faibles : douleurs, irritabilité, fatigue persistante sont des alertes à prendre au sérieux.

    La question n’est pas de bannir le dépassement, mais de lui redonner sa juste place. Se dépasser peut être un moteur, mais il ne doit pas devenir une tyrannie. Le yoga et le bien-être rappellent qu’il y a une autre voie : celle de l’effort juste, qui respecte le corps, le mental et l’esprit. Car la véritable performance, au fond, n’est-elle pas de durer… heureux ?


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Le yoga comme boussole dans l’incertitude